Apple mise sur l'IA pour concevoir ses puces : projet Baltra en 2026

Le géant de Cupertino révolutionne sa stratégie avec l'intelligence artificielle générative

Apple franchit une nouvelle étape dans sa transformation technologique en intégrant l'intelligence artificielle générative directement dans le processus de conception de ses puces. Cette révélation, faite par Johny Srouji, directeur technique hardware d'Apple, lors d'un discours en Belgique, marque un tournant stratégique pour l'entreprise qui mise désormais sur l'IA pour accélérer et optimiser le développement de ses processeurs.

Parallèlement, Apple développe en secret avec Broadcom son premier processeur serveur spécialement conçu pour l'IA, nom de code "Baltra", attendu pour 2026. Cette double stratégie illustre l'ambition d'Apple de contrôler entièrement sa chaîne technologique, de la conception à l'infrastructure cloud.

L'IA générative au cœur de la conception des puces

"Les techniques d'IA générative ont un potentiel énorme pour accomplir plus de travail de conception en moins de temps, et cela peut représenter un énorme boost de productivité", a déclaré Srouji lors de la réception d'un prix d'Imec, un groupe de recherche en semi-conducteurs qui collabore avec les principaux fabricants de puces mondiaux.

Cette approche révolutionnaire vise à réduire la complexité croissante du design des processeurs. Alors que les puces deviennent de plus en plus sophistiquées, la coordination entre hardware et software devient cruciale. L'IA générative permet d'accélérer cette coordination tout en améliorant la fiabilité du processus.

De l'A4 au Vision Pro : Une évolution technologique majeure

Srouji a retracé le parcours d'Apple depuis la puce A4 de l'iPhone 4 en 2010 jusqu'aux processeurs actuels qui alimentent iPad, Apple Watch, Mac et le casque Vision Pro. Cette progression illustre la maîtrise croissante d'Apple dans le design de semi-conducteurs personnalisés.

Le véritable défi ne réside plus seulement dans le hardware, mais dans l'intégration harmonieuse entre composants physiques et logiciels. L'IA générative ouvre de nouvelles possibilités pour optimiser cette synergie, permettant des cycles de développement plus rapides et plus précis.

Projet Baltra : Le pari serveur d'Apple avec Broadcom

En parallèle de cette révolution dans la conception, Apple développe discrètement avec Broadcom son premier processeur serveur IA, nom de code "Baltra". Ce projet stratégique vise à alimenter l'infrastructure cloud d'Apple Intelligence, la suite d'outils IA de l'entreprise.

Baltra est conçu pour équiper les centres de données privés d'Apple et gérer les charges de travail IA trop lourdes pour les puces embarquées dans les appareils. Le processeur devrait être prêt pour la production de masse en 2026, utilisant le processus de fabrication N3P de TSMC, le même que celui prévu pour les puces A19 des iPhone 17.

Private Cloud Compute : L'équilibre entre performance et confidentialité

Apple développe une approche hybride baptisée "Private Cloud Compute" qui répartit intelligemment les tâches IA entre traitement local et cloud. Les fonctionnalités simples s'exécutent directement sur l'appareil, tandis que les tâches plus complexes comme la génération d'images utilisent des serveurs équipés de puces Apple.

Actuellement, Apple utilise des puces M2 Ultra dans ses serveurs IA, mais prévoit de migrer vers les puces M4 en 2025 avant l'arrivée de Baltra. Cette stratégie garantit que les données utilisateurs restent anonymes et ne nécessitent aucune connexion utilisateur.

Une philosophie "all-in" sans plan de secours

Srouji a rappelé la philosophie audacieuse d'Apple : "Quand nous avons migré les Mac vers Apple Silicon en 2020, c'était un pari énorme pour nous. Il n'y avait pas de plan de secours, pas de plan de division de la gamme, nous avons tout misé, incluant un effort logiciel monumental."

Cette même mentalité s'applique désormais aux puces IA. Apple accepte de prendre des risques technologiques majeurs en faisant confiance aux outils d'IA pour accélérer et préciser le processus de conception des processeurs.

L'écosystème EDA : Des partenaires technologiques cruciaux

Bien qu'Apple conçoive ses propres puces, l'entreprise dépend fortement des outils développés par des sociétés spécialisées en automatisation de conception électronique (EDA). Srouji a souligné l'importance de ces fournisseurs comme Synopsys et Cadence dans les efforts de développement d'Apple.

Synopsys a récemment introduit AgentEngineer, un produit utilisant des agents IA pour aider les concepteurs de puces à automatiser les tâches répétitives et gérer les flux de travail complexes. L'objectif est de permettre aux ingénieurs humains de se concentrer sur les décisions de haut niveau.

Cadence développe également ses offres IA, créant une course entre les deux entreprises pour répondre aux besoins des compagnies technologiques qui recherchent des moyens plus rapides et moins coûteux de concevoir des puces.

L'infrastructure actuelle d'Apple Intelligence

Apple Intelligence fonctionne actuellement sur une infrastructure hybride sophistiquée. Les fonctionnalités de base utilisent un modèle de langage de 3 milliards de paramètres fonctionnant directement sur l'appareil, tandis que les tâches plus complexes font appel à des modèles serveur plus importants.

Cette architecture permet à Apple de préserver la confidentialité tout en offrant des performances IA avancées. Le système détermine automatiquement si une requête peut être traitée localement ou nécessite un traitement cloud via Private Cloud Compute.

Les défis de talent et de production

L'intégration croissante de l'IA dans la conception de puces nécessite de nouveaux types de talents. Apple devra recruter des ingénieurs capables de travailler avec les outils IA, ainsi que des profils maîtrisant à la fois le hardware et l'apprentissage automatique.

Simultanément, des puces comme Baltra devront être testées et fabriquées. Apple continuera probablement à s'appuyer sur des partenaires comme TSMC pour la production, mais le travail de conception se déplace de plus en plus en interne avec l'IA jouant un rôle croissant.

L'évolution vers les puces M4 et au-delà

Apple prévoit de migrer ses serveurs IA vers les puces M4 dès 2025, offrant des performances IA supérieures avec un Neural Engine capable de traiter 38 trillions d'opérations par seconde, contre 31,6 trillions pour le M2 Ultra.

Cette transition illustre la rapidité avec laquelle Apple fait évoluer son infrastructure IA, préparant le terrain pour l'arrivée de Baltra qui proposera des performances encore plus élevées grâce à de multiples duplicatas du Neural Engine.

L'impact sur l'écosystème technologique global

La stratégie d'Apple s'inscrit dans une dynamique plus large de transformation de l'industrie technologique. Comme d'autres géants technologiques investissent massivement dans l'IA, Apple mise sur le contrôle vertical de sa chaîne technologique pour maintenir son avantage concurrentiel.

Cette approche contraste avec la dépendance de nombreuses entreprises aux puces Nvidia pour leurs besoins IA, positionnant Apple comme l'un des rares acteurs capables de développer une infrastructure IA entièrement propriétaire.

Conclusion : Vers une intégration IA totale

Avec l'utilisation de l'IA générative pour concevoir ses puces et le développement de processeurs serveur dédiés, Apple dessine les contours d'un écosystème technologique entièrement intégré. Cette stratégie ambitieuse vise à maintenir le contrôle total sur l'expérience utilisateur, de la conception hardware jusqu'aux services cloud.

Le projet Baltra et l'adoption de l'IA générative dans la conception représentent deux facettes d'une même vision : faire d'Apple un acteur autonome et leader dans l'ère de l'intelligence artificielle. Les prochaines années révéleront si cette approche "all-in" permettra à Apple de conserver son avance technologique dans un marché de plus en plus concurrentiel.