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Deezer identifie 18% musiques IA : révolution étiquetage

La plateforme française déploie une technologie révolutionnaire pour détecter et signaler les contenus musicaux générés par intelligence artificielle

Deezer lance le 1er étiquetage mondial des musiques IA. 20 000 pistes artificielles uploadées quotidiennement, 70% des écoutes IA frauduleuses.

Par Sophie Dubois
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Deezer identifie 18% musiques IA : révolution étiquetage

La plateforme française devient pionnière mondiale dans l'identification des contenus générés par intelligence artificielle

Deezer vient de franchir une étape historique en déployant le premier système d'étiquetage au monde permettant d'identifier les albums contenant des titres générés par intelligence artificielle. Cette initiative révolutionnaire s'inscrit dans un combat crucial pour préserver l'authenticité musicale face à l'invasion massive de contenus artificiels qui représentent désormais 18% des nouvelles publications quotidiennes.

La plateforme française de streaming musical confirme ainsi sa position de leader dans la lutte contre la prolifération incontrôlée de musiques générées par IA, une problématique qui menace l'équilibre économique de l'industrie musicale mondiale.

Un fléau qui prend de l'ampleur : 20 000 pistes IA par jour

Les chiffres révélés par Deezer en avril 2025 sont alarmants : la plateforme reçoit quotidiennement plus de 20 000 pistes entièrement générées par intelligence artificielle, soit une progression spectaculaire par rapport aux 10 000 comptabilisées en début d'année. Cette explosion représente désormais plus de 18% de tous les contenus mis en ligne sur la plateforme.

"Les contenus générés par IA continuent d'affluer sur les plateformes de streaming tel que Deezer, et nous ne voyons aucun signe de ralentissement", déclare Aurélien Hérault, Chief Innovation Officer de Deezer. Cette croissance exponentielle illustre l'urgence d'agir face à un phénomène qui dépasse largement les frontières de la simple innovation technologique.

Cette tendance s'inscrit dans un mouvement global qui touche l'ensemble de l'industrie du streaming musical. Selon une étude de la CISAC, la musique générée par IA pourrait entraîner une baisse de 24% des revenus des créateurs musicaux d'ici 2028, représentant une perte estimée à 10 milliards d'euros.

Une technologie de détection révolutionnaire

Pour faire face à cette invasion, Deezer a développé un outil de détection de pointe, fiable à 98% selon son PDG Alexis Lanternier. Cette technologie révolutionnaire analyse le signal audio à un niveau de granularité inédit pour identifier les "marqueurs spécifiques" de l'intelligence artificielle.

"Le signal audio, c'est un nombre d'informations extrêmement complexe. Quand les algorithmes d'IA génèrent de la nouvelle chanson, ils ont des espèces de petits bruits qui les identifient, propres à eux qu'on va pouvoir retrouver. Ce n'est pas audible à l'oreille mais c'est visible dans le signal audio", explique Alexis Lanternier.

L'outil peut détecter 100% du contenu généré par des IA comme Suno et Udio, y compris leurs modèles les plus avancés. Plus impressionnant encore, Deezer a développé un système généralisé capable de détecter le contenu généré par IA sans nécessiter d'entraînement spécifique sur des ensembles de données particuliers.

Un étiquetage visuel pour informer les utilisateurs

Concrètement, les utilisateurs de Deezer voient désormais apparaître un bandeau clairement visible sur l'application mobile ou la version ordinateur. Cette mention indique que "certains morceaux peuvent avoir été créés à l'aide de l'IA", permettant aux auditeurs de faire des choix éclairés sur leur consommation musicale.

Cette transparence s'accompagne d'une décision stratégique majeure : Deezer ne recommande plus les morceaux dont le contenu est généré à 100% par l'IA dans ses algorithmes de suggestion. Cette mesure réduit mécaniquement la rémunération des créateurs de contenus artificiels tout en préservant la visibilité des artistes humains.

Deezer vs Spotify : Deux visions opposées de l'IA

Cette approche tranche radicalement avec celle de son principal concurrent, Spotify. Là où Spotify embrasse l'IA et développe même des outils de création de playlists IA, Deezer adopte une position défensive pour protéger l'écosystème musical traditionnel.

Daniel Ek, PDG de Spotify, se montre "plutôt optimiste et très enthousiaste" concernant l'IA, estimant qu'elle va "encourager davantage de personnes à créer de la musique". À l'inverse, Alexis Lanternier de Deezer prône une "approche responsable et transparente" pour "instaurer la confiance, tant auprès des utilisateurs que des professionnels de la musique".

Cette divergence philosophique se traduit dans les faits : tandis que Spotify développe des publicités générées par IA et teste des outils de DJing automatisés, Deezer investit massivement dans la détection et l'identification des contenus artificiels.

Le fléau des écoutes frauduleuses

Au-delà de la simple prolifération, Deezer a identifié un problème encore plus grave : jusqu'à 70% des écoutes de morceaux générés par IA seraient frauduleuses. Ces écoutes artificielles, générées par des bots, visent à capter une part des revenus issus des royalties.

"Tant qu'il y aura de l'argent en jeu, certains essaieront d'en profiter", résume Thibault Roucou, directeur des droits d'auteur chez Deezer. Les fraudeurs utilisent un système bien rodé : création massive de chansons artificielles (près de 20 000 titres par jour), puis utilisation de bots pour les écouter en boucle afin de générer des revenus automatiques.

Cette économie parallèle représente une menace existentielle pour les artistes légitimes, qui voient leurs revenus potentiels captés par des algorithmes sans scrupule.

L'innovation française face au défi mondial

Avec son outil baptisé "Préludia" en interne, Deezer s'impose comme le précurseur mondial de la lutte contre la musique artificielle. La technologie française a même fait l'objet d'une demande de dépôt de deux brevets fin décembre 2024, témoignant de son caractère innovant.

Cette avance technologique place la France en position de force dans un combat qui dépasse les frontières nationales. L'industrie musicale mondiale observe avec attention l'expérience de Deezer, qui pourrait servir de modèle pour d'autres plateformes.

L'impact sur l'écosystème musical

La stratégie de Deezer s'inscrit dans une vision plus large de protection de l'écosystème musical. En excluant les contenus 100% IA de ses recommandations algorithmiques, la plateforme préserve les revenus des artistes humains tout en maintenant la qualité de l'expérience utilisateur.

Cette approche bénéficie également aux ayants droit et aux maisons de disques, qui voient leurs catalogues protégés contre la dilution causée par l'invasion de contenus artificiels. Mathématiquement, moins il y a d'artistes fictifs dans le bassin de royalties, plus les montants versés aux artistes légitimes sont conséquents.

Les défis technologiques à venir

Malgré ses succès actuels, la technologie de Deezer devra constamment évoluer pour faire face aux progrès des IA génératives. Les créateurs de Suno, Udio et autres plateformes similaires ne restent pas inactifs et développent des modèles toujours plus sophistiqués.

"Les outils disponibles sur le marché aujourd'hui peuvent être très efficaces tant qu'ils sont entraînés sur des ensembles de données provenant d'un modèle d'IA générative spécifique, mais leur taux de détection diminue considérablement dès que l'outil est soumis à un nouveau modèle", reconnaît Aurélien Hérault.

C'est pourquoi Deezer mise sur une approche généraliste, capable de s'adapter aux nouvelles signatures IA sans nécessiter de réentraînement constant.

Une bataille réglementaire en cours

La question de l'IA musicale dépasse le cadre technologique pour devenir un enjeu réglementaire majeur. Plusieurs maisons de disques ont engagé des poursuites contre des intelligences artificielles génératives dans le but d'éviter le "pillage" de leurs catalogues.

L'industrie réclame une législation plus stricte et un étiquetage obligatoire des contenus générés par IA. YouTube a déjà pris des mesures en exigeant des créateurs qu'ils divulguent si leur contenu est généré par IA, mais cette approche reste insuffisante face à l'ampleur du phénomène.

L'avenir de la musique à l'ère de l'IA

La position de Deezer illustre un débat fondamental sur l'avenir de la création musicale. Faut-il considérer l'IA comme un outil créatif au service des artistes ou comme une menace à combattre ? La plateforme française a tranché en faveur de la protection des créateurs humains.

Cette stratégie pourrait lui conférer un avantage concurrentiel auprès des artistes et des mélomanes soucieux d'authenticité. Dans un marché où la différenciation devient cruciale, la promesse d'une "musique vraiment humaine" pourrait séduire une audience en quête d'authenticité.

Conclusion : Deezer trace la voie de l'IA responsable

En déployant le premier système d'étiquetage IA au monde, Deezer ne se contente pas de réagir à une tendance : la plateforme française définit les standards de l'industrie musicale de demain. Cette approche responsable, alliant innovation technologique et protection des artistes, pourrait bien inspirer l'ensemble du secteur.

L'enjeu dépasse largement les frontières de la France : il s'agit de préserver la diversité créative et l'équité économique dans un monde où l'intelligence artificielle redéfinit les règles du jeu. Avec ses 18% de contenus IA quotidiens aujourd'hui, Deezer nous offre un aperçu d'un futur où la distinction entre création humaine et artificielle deviendra l'un des défis majeurs de l'industrie culturelle.

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✍️ À propos de l'auteur

Sophie Dubois

🎓 Expert IA & Technologie

📅 5+ années d'expérience

✍️ 145+ articles publiés

Journaliste tech spécialisée dans les nouvelles technologies et leur impact business. Ancienne rédactrice chez TechCrunch France.

📅 Article publié le 20 juin 2025 à 10:37

🔄 Dernière mise à jour le 24 juin 2025 à 11:13